FASO CULTURE: TOTEMS ET INTERDITS EN PAYS LOBI

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Il y a quelques mois, notre frère Abel posait la question suivante : « bonjour la famille.j’aimerais juste qu’on échange un peu sur les interdits ou totems.Comment les définissez vous ? »

Je voudrais, dans le présent article, vous apporter ma petite contribution comme additif de tout ce qui a été dit auparavant sur ce sujet.
Comme dans la plupart des sociétés africaines, les totems et les interdits font partie des éléments fondamentaux qui structurent et régulent toutes les sphères de la vie, dans la société traditionnelle LOBI. Ils sont les manifestations ou les conséquences d’une croyance religieuse, celle de la religion traditionnelle LOBI.
En effet, les interdits sont les éléments médiateurs entre le sacré et le profane ; ils sont liés à une mise en œuvre particulière du monde, et visent à éviter des conséquences néfastes temporaires ou permanentes. Ils énoncent ce qu’il ne faut pas faire, mais pas ce qu’il faut faire. La transgression d’un interdit est censée déclencher des conséquences néfastes. Dans cette logique, si une « conséquence néfaste » se produit, c’est qu’à priori, un interdit a été transgressé. Toutefois certains interdits sont considérés plus graves que d’autres car ils conduisent inévitablement à la mort. Il s’agit par exemple, du vol de l’adultère ou d’un meurtre commis au sein de la communauté villageoise par un membre. C’est pourquoi pendant la célébration des funérailles d’un adulte, on procède à l’interrogatoire de celui-ci principalement sur ces trois éléments. Il existe d’autres interdits considérés comme gravissimes tels la désobéissance au père, l’inceste ou plus largement, les unions entre les personnes ayant des liens de consanguinité, etc.
Quant aux totems, ils sont, en général, la conséquence du rapport particulier que certaines forces de la nature entretiennent avec un individu ou un groupe donnés (clan, famille, village). Ces forces se présentent comme des bienfaitrices ou des sources de protection. En retour, ceux qui ont le même totem sont soumis à l’obligation sacrée de ne pas tuer (ou détruire) leur totem, de s’abstenir de manger de sa chair ou d’en jouir autrement sous peine de sanction. Quelquefois, ils sont symboliquement portés (sous forme de sculpture et autres) par ceux qui leur sont soumis. Le python, le silure, le crocodile, le caméléon le varan et le singe sont considérés comme de grands totems.
Dans ce contexte, toute forme d’allergie alimentaire est, à priori, interprétée comme la transgression d’un totem.
En fin de compte, qu’elle soit commise de façon délibérée ou pas, qu’elle soit dénoncée directement par l’auteur lui-même ou par une tierce personne (devin ou témoin oculaire), que l’auteur soit vivant ou déjà décédé, la transgression d’un interdit ou d’un totem doit, d’une manière ou d’une autre, être réparée. C’est la loi traditionnelle et tout le monde est tenu d’obéir. Quelquefois « dura lex, sed lex ! » Autrement dit, dure est la loi mais c’est la loi !

QUE VALENT LES INTERDITS ET TOTEMS AUJOURD’HUI?

De nos jours, bien que les interdits et totems soient toujours respectés par certains LOBI (surtout dans les zones rurales encore homogènes), d’autres par contre n’en n’ont cure. Plusieurs facteurs pourraient expliquer cette dernière réaction. Citons entre autres :

  •  l’adhésion aux religions dites révélées (christianisme et islam) qui ont substitué les interdits traditionnels par de nouveaux: Ce qui est interdit dans ces confessions ne l’est pas forcément dans la société traditionnelle et vice-versa ! Par exemple dans la société traditionnelle LOBI, commettre un vol ou un meurtre peuvent être considérés comme des actes de bravoure dans certaines circonstances alors que dans les confessions religieuses, il est strictement interdit de tuer ou de commettre un vol .
  • La mobilité sociale ou géographique qui pousse certains à adopter de nouveau type de vie, les libérant du coup du carcan des interdits ou des totems : Combien sont-ils encore, les LOBI qui ont le réflexe de demander les ingrédients des mets avant de les consommer ?
  • Le déracinement culturel : combien de LOBI connaissent, ne serait-ce par curiosité, les interdits et totems de leurs familles respectives ?
    Faut-il, en fin de compte, se réjouir de cette situation ? Faut-il s’en alarmer ? Il appartient à chaque LOBI de se déterminer à partir, certainement, des enjeux purement personnels !

QUELQUES INTERDITS DANS LA SOCIETE TRADITIONNELLE LOBI :

A- INTERDITS CONSIDÉRÉS COMME GRAVES parce qu’ils nécessitent absolument de faire des sacrifices pour les réparer :

  • Commettre un meurtre, un vol, un adultère dans son propre village
  • faire des jurons
  • garder par devers soi les fruits de sa propre récolte alors qu’on est sous sa tutelle formelle de son père ;
  • Détruire la cuisine de sa femme sous l’effet de la colère
  • à une femme qui est en période de menstruation de faire la cuisine, d’aller au marigot, d’aller au champ.

B- INTERDITS MOINS GRAVES à respecter sous peine de réprimandes :

  • siffloter la nuit
  • enjamber un objet suspect qu’on rencontre sur un chemin
  • pendant la célébration des funérailles, de jeter par la main droite de l’argent dans la corbeille qui se trouve près du balafon ou près du cadavre ;
  • pour un enfant de regarder un mort qu’on conduit au cimetière ou d’y aller

C- QUELQUES REGLES DE POLITESSE OU DE BIENSEANCE

  • pour une épouse d’appeler ses beaux-parents par leurs noms respectifs
  • pour une femme de manger la viande de porc ou de poulet
  • tendre la main gauche pour recevoir ou donner d’un adulte
  • interrompre une personne adulte qui parle
  • parler en mangeant
  • enjamber quelqu’un qui est assis, les jambes allongées

Comme un jeu et surtout, dans le but d’enrichir le débat, je souhaite vivement que vous interveniez pour donner le sens ou le « pourquoi » de l’un ou l’autre des interdits et totems LOBI ; au pire des cas, renseignez-vous auprès des parents qui sont autour de vous !
Par exemple,
qui pourrait me dire pourquoi, dans la société traditionnelle LOBI, il était interdit de siffloter la nuit ?
Pourquoi il était interdit à un enfant de regarder un mort qu’on conduit au cimetière ou d’y aller ? etc.

Rappelez-vous que nous sommes dans un marché « du donner et du recevoir où nul n’est assez riche pour ne rien recevoir des autres ou assez pauvre pour ne rien donner aux autres » Donc, à bon entendeur, Salut et à vos plumes !

#Lobitude

1 COMMENTAIRE

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    Oumar

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