Qu’est-ce que le Carême ?
Le mot « carême » vient du latin « quadragesima » (quadragésime) qui veut dire quarantième. Il désigne la période de quarante jours pendant laquelle l’Eglise se prépare à Pâques par une vie chrétienne plus intense et par diverses pratiques de pénitence. Un voyage spirituel de quarante jours.
La durée du Carême – quarante jours sans compter les dimanches – fait en particulier référence aux quarante années passées au désert par le peuple d’Israël entre sa sortie d’Egypte et son entrée en terre promise. Elle renvoie aussi aux quarante jours passés par le Christ au désert entre son baptême et le début de sa vie publique. Ce chiffre de quarante symbolise les temps de préparation à de nouveaux commencements.
On peut ajouter que les quarante jours du Carême nous rappellent et vont nous permettre de revivre avec le Christ au désert les quarante années de la marche (de voyage) des Hébreux vers la Terre promise. Au long de ces années, le peuple que guidait Moïse eut souvent faim et soif. Parfois, il se découragea, mais il fit surtout l’expérience unique de la tendresse de Dieu envers lui.
C’est la même expérience d’intimité avec Dieu que souhaite revivre toute la communauté des croyants, baptisés ou candidats au baptême, alors qu’elle se met en route vers la Pâque, pour y trouver « la joie d’un cœur unifié » dans la communion au Christ mort et ressuscité. Le peuple chrétien entreprend un voyage spirituel ayant pour destination Pâques.
Comment vivre le carême concrètement ?
Durant le temps du carême, nous sommes invités à nous donner des moyens concrets, dans la prière, la vie sacramentelle, la pénitence et l’aumône pour nous aider à discerner les priorités de notre vie. Le temps du carême est un temps autre qui incite à une mise à l’écart pour faire silence et être ainsi réceptif à la Parole de Dieu.
Le jeûne, la prière et l’aumône (ou le partage)
L’évangile de ce jour du début de carême est un passage de saint Matthieu – chapitre 6, versets 1 à 6 et 16 à 18 – qui incite les fidèles à prier, à jeûner et à agir, non pas de manière orgueilleuse et ostentatoire, mais dans le secret de leur cœur :
« Quand tu fais l’aumône, que ta main gauche ignore ce que donne ta main droite, afin que ton aumône reste dans le secret ; ton Père voit ce que tu fais en secret.
Quand tu pries, retire-toi au fond de ta maison, ferme la porte, et prie ton Père qui est présent dans le secret.Quand tu jeûnes, parfume-toi la tête et lave-toi le visage ; ainsi ton jeûne ne sera pas connu des hommes, mais seulement du Père qui est présent dans le secret ».
Durant ce voyage spirituel pour nous préparer à la fête de Pâques, tout fidèle chrétien est invité à vivre avec le Christ et à entrer dans un combat spirituel comme Jésus durant ces 40 jours de jeûne au désert.
Comme Jésus qui a résisté à Satan par trois fois, le chrétien aussi peut être vainqueur des trois tentations : la convoitise de la chair, le pouvoir et l’orgueil. Les moyens sont la prière (relation à Dieu), le jeûne (relation au corps) et l’aumône (relation à l’autre)
Le Seigneur n’a jamais séparé dans son enseignement le jeûne de l’aumône et de la prière (Mt 6, 1-18). Les Pères de l’Eglise devaient le rappeler chaque année au peuple avec insistance, en témoignent en particulier les sermons de saint Léon le Grand. Aussi le jeûne s’accompagna-t-il toujours de réunions de prières à l’écoute de la parole de Dieu.
Qui est habilité au jeûne catholique ?
Les personnes qui doivent jeûner sont celles de 10 à 60 ans.
Le carême est lié au jeûne. Même si les chrétiens d’Occident ont perdu le sens du jeûne, nous constatons que les Eglises d’Afrique sont en train de redécouvrir le jeûne. Le comportement alimentaire de l’homme ne dépend pas seulement des besoins physiologiques mais appartient au registre de l’affection et du désir.Dans un livre qui vient de paraître, intitulé : « L’Eglise Famille redécouvre le jeûne », j’affirme, dans ce livre, qu’il s’agit moins de renouer avec une pratique que de retrouver le sens d’un comportement. Le jeûne nous apprend à avoir faim, à diminuer nos besoins, à nous confier à Dieu pour le lendemain, à creuser notre désir pour l’ouvrir à une autre réalité, celle de l’être et non plus l’avoir.
Le jeûne nous permet de mieux connaître ce qui nous habite, quels sont nos désirs les plus profonds, de quoi nous avons faim.Ce temps de jeûne peut être un temps de réflexion, de méditation sur les valeurs essentielles de notre condition humaine. Un temps où nous revenons aux choses importantes.
Dans ce contexte, jeûner ne veut pas dire se priver totalement de nourriture, mais se priver de certaines choses qui encombrent notre vie afin de focaliser davantage notre énergie sur d’autres choses bien plus importantes. Par exemple, durant ces quarante jours, quelqu’un pourrait-il essayer de se priver d’Internet, de WhatsApp ou de télévision ? Voilà une forme de jeûne ! En faisant ainsi, vous libérez plus d’espace dans votre vie. Vous aurez plus de temps pour prier, méditer la Parole de Dieu et reprendre des forces intérieures.
Entre Cendres et Pâques, essayons de connaître notre véritable faim, de voir clair en nos vies, de mettre de l’ordre en nos vies.
Comment doit-on jeûner concrètement ?
Voici quelques propositions.
Suivre ce que l’Eglise locale vous recommande en essayant de savoir avec précision ce qu’elle recommande pour le Carême.
Une proposition pourrait être la suivante : jeûner en ne prenant qu’un repas par jour au coucher du soleil. Boire de l’eau.
Jeûner au pain et à l’eau tous les jours sauf le Dimanche.
Jeûner au pain et à l’eau deux fois par semaine – le mercredi et le vendredi. (comme dans la première communauté chrétienne au temps des apôtres) – NB : Jeûner au pain et à l’eau veut dire que l’on peut prendre du pain simple et boire de l’eau. D’ailleurs, pour les catholiques, l’eau ne coupe pas le jeûne. On peut boire de l’eau pendant le Carême à tout moment.
Quel comportement le fidèle catholique doit-il avoir pendant ce temps de carême ?
L’Eglise invite les chrétiens à se donner davantage à la prière, à combattre nos vices et en étant attentif au prochain.
Pendant ce temps de carême, il convient de prendre le temps de nous recueillir, même dans une vie agitée et remplie de beaucoup d’activités. Prier à l’image de Jésus lui-même qui, dans une vie très active, savait prendre du temps, loin de la foule, pour prier. Prendre du temps pour lire la Parole de Dieu, la méditer. Cela voudra dire que l’on éteint la télévision, on coupe la radio, et l’on évite d’être trop dépendant de son téléphone. Se décider à prendre chaque jour du temps pour la prière, il s’agit de voir son emploi du temps et se décider à sortir de la superficialité de certains emplois de temps pour donner la priorité à l’essentiel.
Prendre le temps de la Lectio Divina (une lecture priante de la parole de Dieu). Aussi, vivre le chemin de croix avec la communauté chrétienne de la CCB chaque vendredi de Carême est une manière de vivre un Carême qui plaît à Dieu. Il faut aussi partager en ce temps de carême. Pour les chrétiens de l’Eglise primitive, c’était précisément la pratique du partage qui faisait la différence avec les païens. Ils avaient conscience que la charité envers les pauvres permet d’accéder à une révélation sur Dieu.
Dans un écrit des premiers siècles (Le Pasteur – Hermas), nous lisons ceci : « Tu ne prendras, ton jour de jeûne, que du pain et de l’eau puis, tu calculeras le montant de la dépense que tu auras faite ce jour-là pour ta nourriture et tu le donneras à une veuve, à un orphelin ou à un indigent : ainsi tu te priveras afin qu’un autre profite de ta privation pour se rassasier et prie pour toi. »
Dans un autre écrit des années 128 l’Apologie d’Aristide, nous lisons : « Lorsqu’il y a un pauvre parmi eux (les chrétiens) qui a besoin d’être secouru, ils jeûnent pendant deux ou trois jours et ont coutume de lui envoyer la nourriture qu’ils s’étaient préparée pour eux-mêmes. De même, pour ceux qui sont en prison, quand on n’a pas de quoi leur acheter des vivres. Ainsi, le jeûne devient source de l’aumône.
La vie terrestre était perçue comme un don de Dieu pour accéder à la communion. Le Carême est aussi un temps de Metanoia. Un temps de pénitence, de conversion et de réconciliation.
Dès le premier jour du Carême, le mercredi des Cendres, nous avons entendu : convertissez- vous et croyez à la bonne nouvelle ! Il convient que ce temps soit marqué par notre conversion, un retour à Dieu si nous nous étions éloignés de lui. Un retour par une préparation et la réception du sacrement de réconciliation. Le pardon de Dieu est toujours possible si nous faisons une démarche vraiment sincère, en reconnaissant nos péchés et en les regrettant. En se reconnaissant pécheur et en venant à lui dans ce sacrement, nous croyons à l’amour infini de Dieu qui est toujours le plus fort.
Source : lepays / interview avec le père des Jésuites Jean Ilboudo de la Théotokos S.J.