Burkina/Crise sécuritaire et humanitaire dans la région du Centre-Nord: Les natifs recommandent (Buud-Warba)

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25 mai 2020

Bureau politique national (BPN)

Conférence de presse sur la crise sécuritaire et humanitaire dans la région du Centre-Nord
Ouagadougou, siège national de l’UPC, le 25 mai 2020
dont les Animateurs  sont:

– Honorable Mathias OUEDRAOGO, Député du Sanmatenga,
– Monsieur Dieudonné O. BADINI, Maire de Bourzanga (Bam),
– Professeur Mahama OUEDRAOGO, SG adjoint de l’UPC / Bam
– Colonel à la retraite Assane SAWADOGO, Secrétaire national de l’UPC en charge de la Défense et de la sécurité, ressortissant du Centre-Nord.
– Ludovic LALLOGO, Vice-Président du Conseil régional du Centre, représentant le Namentenga.

Mesdames et Messieurs les journalistes,

Nous vous souhaitons la bienvenue au siège national de l’UPC. La présente conférence de presse est une suite logique des précédentes qui ont traité de l’insécurité dans les régions du Sahel et de l’Est.

Nous souhaitons ainsi échanger avec vous sur la crise sécuritaire et humanitaire dont la région du Centre-Nord est en proie depuis 2017.

A l’entame de nos échanges, nous vous invitons à observer une minute de silence en mémoire de tous nos compatriotes et des amis du Burkina qui sont tombés dans les attaques terroristes que notre pays subit.

MINUTE DE SILENCE
Nous vous remercions.

En rappel, le Centre-Nord compte 03 provinces, à savoir le Sanmatenga, le Bam et le Namentenga, et 28 communes, avec une population d’environ 1,2 millions d’habitants. Elle est limitée:
• Au nord  par la Région du Sahel ;
• Au sud par les Régions du Plateau Central et du Centre-est ;
• A l’est la Région de l’Est ;
• A l’ouest par la Région du Nord.
03 de ces 04 régions frontalières vivent les mêmes réalités du terrorisme.

Concernant la genèse du terrorisme dans le Centre-Nord, les premières attaques de nature terroriste remontent à Novembre 2017, et ont été perpétrées contre le poste de Gendarmerie Bourzanga, dans le Bam.

Les attaques ont augmenté d’intensité en 2018 dans cette commune et dans d’autres comme Zimtanga.

Mais c’est en 2019, dès le 1er janvier, que les choses ont véritablement basculé, avec les attaques terroristes et les massacres de Yirgou.

Depuis lors, le Centre-Nord vit une série d’attaques meurtrières qui touchent Barsalogho, Pissila, Namissiguima, Pensa et Dablo dans le Sanmatenga ; Bourzanga, Zimtanga, Rollo, Kongoussi et Nasséré dans le Bam.

La province du Namentenga, jusque-là épargnée, a connu aussi des attaques, notamment dans les communes de Tougouri et Bouroum, pour ne citer que celles-là.
Chronologiquement, les premières attaques ont visé les Forces de défense et de sécurité, notamment les postes de police et de gendarmerie, ainsi que les détachements militaires.

Le deuxième niveau d’attaque a visé les représentants de l’Etat : les préfets, les maires, les conseillers municipaux, les CVD, les enseignants, les infirmiers, …

Le troisième niveau d’attaque a eu pour cibles les civils et les leaders communautaires (chefs coutumiers, chefs religieux, leaders d’opinion, Kogl-Wéogo)

Enfin, le quatrième niveau d’attaque a ciblé les femmes, à travers des viols, des séquestrations, des tueries et des prises d’otage.

Ces attaques ont des conséquences incalculables sur le plan social et sur le plan économique.

Au plan social, les attaques terroristes au Centre-Nord ont causé des centaines de morts et autant de blessés, des milliers de déplacés internes, et l’abandon de nombreux villages et champs par les habitants.

A titre d’illustration, à Bourzanga, dans la province du Bam, 38 sur les 42 villages ont été vidés de leurs populations. Sur les 380 villages que compte la province du Sanmatenga, 110 ont été vidés de leurs populations.

Les terroristes, dans l’optique de créer le maximum de terreur, ont égorgé des enfants devant leurs parents, et ont déchiqueté, et même brûlé des corps.

A la date du 22 avril 2020,   la Région du Centre-Nord comptait 687.675 déplacés internes sur un total de 848.329 déplacés recensés sur l’ensemble du territoire national. Ce qui veut dire que le Centre-Nord enregistre à lui seul 81,06 pourcent des déplacés internes du Burkina.

Par ailleurs, les chiffres que vous verrez dans le tableau ci-dessous montrent que 57,20 pourcent des habitants du Centre-Nord sont des déplacés internes.

SITUATION DES PERSONNES DEPLACEES INTERNES (PDI) DANS LE CENTRE-NORD

N°
Provinces

(a )
Population

( b )
Nombre de PDI

14/04/2020
( c )
Taux
( d )=c/b*100

01
Bam

275 191
104 098
37,82%

02
Namentenga

328 820
88 383
26,87%

03
Sanmatenga

598 014
495 194
82,90%

Total
1 202 025
687 675
57,20%

Les déplacés internes sont sans abris ou dans des abris précaires, en témoignent les dégâts causés sur le site d’accueil de Kongoussi par les premières pluies.

Ces déplacés ont abandonné le plus souvent leurs vivres et bétail dans la fuite.

Malgré les appuis ventant de l’Etat, des ONG, des Associations, des partis politiques et des particuliers, la prise en charge de ces compatriotes déplacés s’avère insuffisante.

Des écoles et des centres de santé sont fermés dans plusieurs communes. Le cursus scolaire de milliers d’élèves se retrouve ainsi bloqué.

Les terroristes confisquent des médicaments et des moyens de transport des malades (ambulances, motos,…)

Au plan économique, le secteur agricole, qui emploie l’écrasante majorité des populations, est à l’abandon.

Les terroristes interdisent à la population de semer et de cultiver.
L’élevage prend également un sérieux coup.

Une bonne partie du cheptel est emportée, et ordre a été intimé à la population de quitter les champs de culture et de pâturage.

Les autres activités économiques (commerce, orpaillage, pêche) sont pratiquement suspendues à cause de l’abandon des sites.

Mesdames et Messieurs les journalistes,

La situation sécuritaire est en train de s’enliser dans le Centre-Nord, à cause de plusieurs facteurs.
En effet, au plan sécuritaire, nous relevons :

– Une insuffisance de moyens matériels de combat (armes et munitions en quantité et en qualité) pour nos FDS et les volontaires de défense pour la patrie (VDP)

– Une insuffisance dans la prise en charge des FDS sur le terrain de bataille, notamment en ce qui concerne l’alimentation, les soins et la motivation financière;

– Un sentiment d’abandon de la Région par l’Etat central, nourri par la population des zones frappées par l’insécurité ;
– Une insuffisance de collaboration, de coordination et de solidarité entre les FDS et les populations ;

– Un mauvais fonctionnement des réseaux de téléphonie mobile : interruption répétitive des réseaux Orange et Télécel, et coupure permanente du réseau Telmob.

Aux  plans social et administratif, les facteurs suivants concourent à l’enlisement de la crise :

– Des difficultés dans le domaine de l’hébergement des déplacés, avec la saison pluvieuse qui s’annonce : des sites d’hébergement inadaptés à la période de pluie, des déplacés encore sans abris ou non logés ;

– Des insuffisances dans la prise en charge alimentaires : (insuffisance constatées dans la répartition des dons : certains déplacés ont faim, d’autres, par contre sont dans l’abondance) ;

– Une mauvaise gestion et même des détournements de vivres et de fonds destinés aux déplacés internes ;

– Une absence de prise en charge sanitaire spécifique des déplacés: pas de mise en place de structures de santé spécialement pour les déplacés (centres de soins, médicaments,…) ;

– Un fonctionnement difficile des mairies : absence de certains maires de leur commune, difficultés dans le recouvrement des recettes budgétaires et dans la tenue des sessions des conseils municipaux.

Au plan économique, les facteurs ci-après compliquent la situation :

– Dans le secteur de l’Agriculture, on note une impossibilité pour les déplacés de regagner leurs villages et leurs champs de culture ;

– Dans le secteur du Commerce  et de l’industrie, on note une indisponibilité de ressources matérielles et financières pour reprendre les activités économiques.

Chers journalistes,

Depuis le début de la crise sécuritaire et humanitaire dans le Centre-Nord, l’UPC a joué sa partition en apportant des vivres et des non-vivres dans les provinces du Bam (Bourzanga et Kongoussi) et dans le Sanmatenga (Barsalogho, Yirgou, Pissila, Kaya, Dablo et Pensa).

Au regard de la situation très critique que vit la région, l’UPC propose les solutions concrètes suivantes:
Au plan sécuritaire :

– Un renforcement de la coordination entre les FDS et les forces vives pour une meilleure coordination des actions défensives ;

– Une mise à la disposition des FDS de grands moyens pour lutter efficacement  contre les ennemis;
– Un équipement adéquat des volontaires pour plus d’efficacité ;

– Le lancement d’une deuxième opération militaire d’envergure pour anéantir le terrorisme sur notre territoire, l’opération « N’Dooffu » n’ayant pas produit les résultats escomptés.

Au plan social, nous proposons:

– La réquisition de bâtiments administratifs pour héberger les déplacés internes ;

– Le développement d’une solidarité agissante qui encourage chaque famille à héberger un ou plusieurs déplacés, selon ses capacités ;

– L’installation de postes de santé primaires au niveau des camps de déplacés ;

– L’aménagement de sites d’hébergement des déplacés après leur installation provisoire ;

– La prise en charge par l’Etat des pupilles (enfants des volontaires) jusqu’à l’âge de la majorité ;

– L’amélioration de la qualité de la gestion des divers dons, à travers la mise en place d’une structure de suivi-contrôle dans les communes hébergeant des personnes déplacées internes.

Mesdames et Messieurs de la presse,

Outre ces propositions, nous recommandons solennellement au Gouvernement burkinabè :

1– d’initier un plan de retour et de réinstallation des personnes déplacées internes dans leurs localités d’origine ;

2- De s’investir pour la mise en place d’une structure de renseignement citoyen et endogène dénommée « Buud-Warba », qui sera sous la coupe de l’Agence nationale de renseignement (ANR).

Appel

Nous, responsables de la Fédération UPC du Centre Nord,
– Considérant le nombre important des personnes déplacées internes dans les régions sous attaque terroriste, et particulièrement dans la région du Centre-Nord ;

– Considérant les besoins énormes dans le cadre de leur prise en charge aux plans sécuritaire, alimentaire, sanitaire et de l’hébergement,

Lançons un appel à plus de solidarité nationale à l’image de celle manifestée dans le cadre de la lutte contre la Covid-19.

Chers journalistes, c’était-là notre déclaration liminaire. Nous vous remercions pour votre disponibilité.

Lue  par  l’ Honorable  Député  Mathias OUEDRAOGO.

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