A l’occasion de la Journée mondiale de l’excision, célebrée chaque 6 fevrier 2022, à cette occasion, votre média, Faso Amazone.net, a rencontré à Ouagadougou, Mariam Lamizana/Traoré(MLT), coordonnatrice de l’association « Voix de Femmes », coordonnatrice du collectif des feministes du Burkina, présidente du Comité inter -africain(CAF) sur les pratiques traditionnelles ayant des conséquences sur la santé des femmes et des enfants.
MLT: C’est vraiment un moment très fort et pour les personnes et les structures engagées dans le cas de la lutte contre les mutilations génitales féminines (MGF) parceque nous avions depuis 20ans organisé une Conférence internationale sur la Tolérance Zéro aux MGF avec nos partenaires que sont les agences des nations unies, l’UNFP et l’UNICEF et à l’issue de cette conférence à Addis Abbéba, une Grande recommandation a été prise à savoir « l’adoption le 6février , de la journée internationale de la tolérance zéro ».
FAm: Pourquoi le 6 février ?
MLT: Parceque le 6 février correspond à la date de création du Comité inter africain à Dakar « donc ensemble, on a convenu que pour faire avancer ce processus d’abandon de la pratique des MGF, il était de bon ton d’initier à l’instar d’autres pays tels que le Burkina Faso (BF) qui a sa journée nationale de lutte contre la pratique de l’excision, d’initier une journée internationamle qui va féderer toutes les énergies au même moment, et deux ans après le plaidoyer s’est poursuivi auprès de l’Assemblée générale des nations unies qui a accepté institutionnaliser cette journée,
donc, depuis 2005, 2006, » chaque année, le 6 février est institutionnalisée journée internationale de la tolérance zéro aux MGF . Donc, ça fait 20ans que cette journée existe ».
Le changement de comportement , le changement de mentalité ne s’acquiert pas à un tour de main donc, c’est un travail de longue haleine, c’est un travail de patience , c’est un travail continu de sensibilisation, un travail continu de plaidoyer « sensibilisation au niveau de la communauté pour susciter une mobilisation communautaire, une mobilisation sociale et plaidoyer auprès des autorités pour que dans tous les discours officiels politiques, administratifs, puissent s’engager pour annoncer des messages forts, d’engagements dans la lutte contre cette pratique et le lobbying également pour que les différents législateurs révisitent leurs lois pour prendre en compte cette pratique « donc que je crois que beaucoup de choses ont été faites, beaucoup de choses ; c’est vrai que le bout du tunnel est encore loin, mais quand on régarde les statistiques par rapport à la prévalence, il y’a d’espoir.
Je sais qu’au Burkina, la pratique continue malheureusement, mais si on régarde du coté des jeunes enfants, de la tranche d’ages de 0 à 14ans , la prévalence baisse ; on a une prévalence entre 11 et 14% , donc cela veut dire qu’il y’a un peu d’espoir, maintenant, il faut faire du corps à corps et cibler les communautés qui posent problème, cibler les groupes sociaux professionnels ou il faut mettre encore l’accent, les leaders religieux , les leaders traditionnels pour susciter plus d’engagements, plus de mobilisations à leurs niveaux et je crois qu’avec tout cela, la pratique peut réculer, malheureusement comme vous l’avez dit, la pratique a la peau dure parce qu’avec la loi dans notre pays, les gens savent que y’a la loi, il ne faut pas le faire, même s’ils le font en cachète, mais dans d’autres pays tels que le Mali, il n’ya pas de loi, ce qui fait que les communautés des zones frontalières dépassent la frontière, traversent la frontière pour faire exciser leurs enfants, c’est ce qu’on appelle la pratique Transfrontalière qui malheureusement constitue un handicap, il y’a également l’âge qui a regressé, aujourd’hui, c’est sur des bébés, des enfants de moins de cinq ans et moi je crois que c’est une tentative de ne pas échapper à cette pratique, donc c’est autant d’éléments regrettables pour lesquels il faut encore pousser les choses.
C’est pour cela que pour le thème de cette année, on s’est dit « vingt ans que nous avons proclammé la journée tolérance zéro aux MGF, il faut faire un point pour faire le bilan et examiner les défis et les perspectives, voila le bilan, vingt ans de lutte de la journée tolérance zéro, bilan défis et perspectives .
Dans le cas des litiges stratégiques, il y’a deux ou trois ans, avec un partenaire Equality Now, nous avions tenté de mettre en place ce qu’on appelle les litiges d’impacts stratégiques « on a profité d’un procès supporté par la partie civile, mais malheureusement, à l’époque, nous avons été boosté de ce rôle parceque la loi n’autorisait pas les organisations de la société civile (OSC) de tester comme partie civile, mais on avait une avocate qui a poursuivi la plaidoirie et malheureusement ca n’a pas abouti. On devait faire appel « vous savez, les avocats, il faut les payer, donc comme on n’avait pas suffisamment de ressources, c’est rester en chemin, mais, nous avions poursuivi cette stratégie avec ISLA qui est un partenaire, nous avons un projet, c’est les cas de violence, il n’ya pas que l’excision, il y’a d’autres violences dont les femmes sont victimes qui sont prises en compte dans cette stratégie.
En fait les 20ans s’identifient à l’institutionnalisation de la journée tolérance zéro, si non la lutte organisée depuis 1990 et la lutte non organisée date depuis l’arrivée des pères blancs avec la 1ère republique et à partir de la proclamation de l’année internationale de la femme 1975 « que les choses ont commencé à prendre corps de manière sporadique.
Maintenant quel bilan peut-on faire , on peut dire qu’il y’a un impact , aujourd’hui, le problème est posé à la conscience nationale, donc, personne ne peut dire qu’elle n’est pas au courant que la pratique des MGF n’est pas bonne et interdites dans notre pays « Donc, pour l’information à passer, cette problématique est posée à la conscience nationale suscite un débat avec une polémique des pour et des contre , il y’a également le fait qu’aujourd’hui nous avons une mobilisation communautaire et sociale autour de la question, on a pu susciter l’engagement et la participation de certains leaders d’opinions tels que les leaders coutumiers et les leaders religieux, des organisateurs de la société civile (OSC) qui sont mobilisés et la presse, les associations d’organes de presse qui sont mobilisées qui nous aident à faire passer le message.
il y’a la volonté politique qui s’est traduite par la mise en place d’un cadre institutionnel, la mise en place d’un fond qui soutient au niveau national la pratique des MGF, il y’a la loi, les programmes qui existent, c’est un peu une volonté politique, il y’a l’accompagnement des partenaires techniques et financiers ; donc le programme conjoint UNICEF qui traite de la problématique des MGF et des mariages d’enfants, ce sont des ressources destinées à ces deux problématiques, c’est autant d’actions, d’efforts qui ont été déployés suite à toute cette campagne de sensibilisation que nous avons mené depuis lors.
FAm: Quelles sont les peines encourues par les personnes exciseuses?
MLT: Les peines ont été révisées à la hausse et le quantum a été augmenté « je sais qu’ aujourd’hui la pratique de l’excision est un crime, elle est criminalisée, à l’époque les peines allaient de trois à cinq ans, maintenant c’est de cinq à dix ans, sinon plus, et pour le personnel médical, la suspension n’excède pas cinq ans, la suspension d’un agent de santé qui s’adonnerait à cette pratique va jusqu’à cinq ans maximum, je pense qu’il y’a beaucoup d’efforts qui ont été faits , malheureusement il y’a toujours des zones de résistance qui sont encouragées par certains acteurs, je penses qu’il faut être très régardant, ne pas baisser la garde et moi je sollicite toujours le concours de la presse surtout les femmes engagées dans la presse pour suivre la sensibilisation afin de passer le bon message, il n’ya que cela et de temps en temps, nous allons sévir vers la loi.
FAm: Qu’est-ce que l’excision selon vous ?
MLT: En fait, il y’a plusieurs types d’excisions, si non que l’excision consiste à l’ablation du clitoris suivi des petites lèvres, des grandes lèvres appelées type 1 et type 2 et le type 3 est l’infubulation, on coupe le clitoris, les petites lèvres, les grandes lèvres et on coud.
Le type 4 ; c’est toute forme de pratiques qui ont tendance à rendre flasque le clitoris ou à l’étirer.
interview realisé par
Irène Soulama